Histoire du SEL appelé LETS à l’origine (Local Exchange Trading System) : La source
De tout temps, le troc a été pratiqué, surtout dans les campagnes (tu viens m’aider à moissonner, et je t’aiderai pour ta clôture).
A la suite des crises suscitées par le capitalisme dans son train d’ascensions et de chutes, plusieurs tentatives d’expériences de lancement d’une monnaie locale ont
eu lieu, mais c’est l’ouvrage de Silvio Gesell (1862-1930) : « l’ordre économique naturel » qui a conféré à ces expériences leur portée théorique.
Gesell a donné sa doctrine à l’école dite de « l’économie libre » qui récuse la monnaie conventionnelle en raison de sa fonction double, instrument de circulation et de thésaurisation, qui oppose l’intérêt des acteurs à l’intérêt collectif.
Dans le cadre d’une « économie naturelle », il convenait au contraire que l’intérêt égoïste de chacun concoure au bien commun.
Il fallait donc redéfinir l’argent de telle sorte que les nantis aient avantage à s’en débarrasser, c’est-à-dire à le faire circuler. L’activité économique s’en trouverait
accélérée, la demande de biens serait accrue et l’accès au crédit facilité.
Les premiers systèmes d’échange en Autriche : une expérience célèbre eut lieu à l’initiative du maire de Worgl, pendant la crise des années 30, une petite ville du Tyrol autrichien.
Celui-ci, voyant l’infrastructure de sa ville s’écrouler, le chômage et la pénurie s’étendre, décida de s’inspirer des théories de Gesell et de créer une monnaie locale dont la caractéristique principale était de se déprécier de 1% tous les mois (pour qu’un billet reste valable, un timbre devait être apposé au billet un jour donné de chaque mois). L’argent local se mit à circuler à toute vitesse car les gens avaient intérêt à le dépenser, et devaient le dépenser localement, dans le seul circuit où il avait cours.
En une année l’économie locale reprit du souffle et le nombre des chômeurs baissa considérablement.
Worgl devint un centre d’intérêt pour les économistes du monde entier. Mais, alors que d’autres communes autrichiennes s’apprêtaient à suivre son exemple, la Banque Nationale Autrichienne entreprit une action en justice et ce système d’économie alternative disparut en 1933.
Ce système d’une monnaie qui se déprécie chaque mois, existe toujours en Bavière, c’est le « Chiemgauer ».
Les premiers LETS au Canada
Les années 60 et 70 aux Etats Unis ont vu de nombreuses expérimentations sociales, et entre autres, des systèmes d’échange de savoirs et des réseaux de baby-sitting, souvent basés sur une mesure en heures ou en points.
Dans les années 70, la région de Vancouver, au Canada, connaissait un fort mouvement de retour à la terre, avec des expériences coopératives et communautaires.
De plus, la fermeture de l’industrie minière avait provoqué une augmentation du chômage.
Les gens manquaient d’argent. En 1976, dans la ville de Vancouver, David Weston lance un système d’échange appelé Community Exchange (échange communautaire), où la mesure des échanges est fondée sur le temps.
Puis il lance un système semblable sur l’île de Vancouver, tandis qu’il donne des conférences-ateliers au cours desquelles un jeu montre aux gens comment l’argent «normal » va toujours aux plus riches, et manque aux personnes et régions pauvres. Le système de David Weston devenu le Green Dollar Exchange (échanges en dollars verts) se développe.
Ce système recommande le rapport de salaires 1/3, c’est-à-dire, salaire minimum de 6 dollars/heure, maximum 18 dollars/heure (on est loin du rapport actuel de plus de 1 à 100).
Il apporte aussi une limite au solde négatif, afin d’éviter des débits trop grands.
De plus il s’appuie sur la participation et la responsabilité des adhérents, avec des réunions régulières.
Inspiré par cette idée, Michael Linton démarre, en 1983, toujours sur l’île de Vancouver, un système d’échange fondé non plus sur l’unité de temps, mais sur le Green Dollar (dollar vert), qui a une valeur équivalente au dollar canadien. Il appelle ce système Local Exchange Trading System, LETS (Système d’échange et de commerce local).
Il réalise un logiciel informatique de gestion des échanges.
Il crée une entreprise, Landsman Limited., afin de mettre en place un système expérimental et de diffuser ses idées.
Le LETS de Michael Linton se développe très vite, des entreprises locales y participent. Mais deux ans et demi plus tard, le système s’effondre.
Des adhérents du système expliquent qu’il a « mal tourné ».
Afin de ne pas refaire ces erreurs, voyons les raisons qu’ils donnent : Le système était dirigé par une seule personne, sans participation des adhérents.
Cela contribuait à un manque de confiance, et les membres ne pouvaient pas intervenir lorsque les choses allaient de travers.
Il s’est trouvé qu’un participant avait un débit de 14 000 « dollars verts ». On a eu l’impression qu’il profitait du système sur le dos des autres.
Une telle dette, par rapport au taux d’intérêt de 12% à l’époque, représente un gain de 140 dollars par mois. Le système s’est révélé non transparent. Bien que les règles prévoient qu’un adhérent puisse demander le solde et le mouvement de chaque compte, en fait, personne ne le faisait. On invoquait la Confiance.
En réalité, une demande de connaître le solde d’un compte devait être transmise à la personne concernée, démarche difficile et dissuasive.
Les entreprises atteignaient des hauts crédits sans possibilité de les dépenser.
Deux ont fait faillite. Elles auraient aussi souhaité la possibilité de gérer informatiquement leur compte.
Linton espérait que le système puisse augmenter jusqu’à des proportions énormes, ce qui s’est révélé irréaliste. De plus, il comptait sur le LETS, considéré comme une entreprise de services, pour assurer son propre revenu tandis qu’il développait et diffusait le concept LETS. Mais c’était une charge financière trop importante pour un groupe expérimental local.
Les LETS dans les pays anglo-saxons
Dès la fin des années 80, les systèmes LETS commençaient à proliférer en Angleterre, dans des zones où le chômage atteignait des taux record.
Et cela, selon une dynamique de réseau : un véritable kit contenant des conseils, des encouragements, des adresses, des échantillons de « chèque », de bilan comptable, de listes de services, et même un logiciel, est mis à disposition de tout groupe débutant, mais chacun à la tâche d’adapter le dispositif aux particularités locales.
La « charte » LETS, qui donne son identité au système, inclut les principes suivants :
1) Les participants évaluent eux-mêmes les transactions ;
2) Il n’y a pas d’obligation d’accomplir des transactions ;
3) Le système LETS tient la comptabilité des échanges en termes de débit et de crédit, évalués selon une « unité de compte » définie localement ;
4) Seules ces unités entrent dans la comptabilité, mais un complément monétaire peut être convenu lors d’une transaction, dans le cas notamment où le service entraîne un coût monétaire (essence, achat de matériel…) ;
5) Le système central diffuse les offres de service émanant des participants, mais n’est pas responsable de la qualité de ces services, de la compétence de ceux qui les proposent ou de leurs problèmes de taxe et d’impôts;
6) L’état du compte de chacun peut être communiqué à d’autres, et la situation de tous les comptes peut être périodiquement communiquée à tous.
7) Enfin, et surtout, les comptes en crédit ou en débit ne donnent lieu à aucun intérêt, et les membres ne sont pas tenus à avoir un compte positif pour accéder à un service.
8) Afin d’éviter que ce système de « compensation d’échanges locaux » ne rencontre
l’écueil canadien, l’accent est mis sur la convivialité, la transparence et la participation de tous aux problèmes de fonctionnement.
9) Un comité est prévu qui repère en temps utile les comptes « déviants » (dont le débit devient trop élevé), et cherche avec leurs détenteurs les moyens de les rééquilibrer.
On estime que les LETS ont proliféré en 1994 à raison de huit à dix par mois en Angleterre, au Canada, aux USA, en Nouvelle Zélande, en Australie, en Irlande, aux Pays-Bas.
Ils dépassent désormais le millier, certains disparaissant très vite, d’autres s’étendant et essaimant.
Sur les 25 LETS lancés au Canada, seulement la moitié fonctionnait encore en 1992. Les LETS en Australie : Jill Jordan diffuse le concept du LETS, mais métissé de caractéristiques issues du Green Dollar Exchange.
Et ça marche ! 45 LETS en 1991, 200 en 1994, dont Blue Mountain, le plus gros LETS au monde avec 1800 adhérents.
Ces LETS sont gérés collectivement, et reprennent de nombreuses caractéristiques des Green Dollar Exchange, par exemple, les bons d’échange.
Certains posent des limites au débit.
En fait chaque groupe redéfinit le système à sa convenance, introduisant une grande variété de fonctionnements. Le nom générique LETS a été adopté.
Les LETS en Europe :
A partir de 1984, David Weston introduit ses idées en Grande Bretagne par une série de conférences. Le premier LETS britannique démarre à Norwich en 1985.
Le nombre de LETS augmente très lentement. Puis un climat favorable se développe, avec l’aggravation de la récession économique, la publication d’un livre sur les LETS, et l’intérêt des médias.
En 1991, Liz Shephard organise une conférence nationale sur les LETS.
Avec l’appui unanime de la conférence, elle lance Letslink UK, réseau de LETS et agence de développement, et y travaille à temps complet.
A partir de 1991, le développement est exponentiel, et il y a aujourd’hui au moins 600 LETS en Grande Bretagne.
En Belgique on expérimente déjà à Gand, Louvain et Anvers, et on discute à Bruxelles.
2) L’origine et l’historique du SEL :
Systèmes d’Échanges Locaux Développement du SEL en France En France, Richard Knights du LETS de Totnes, de Grande-Bretagne, donne une conférence pendant les journées d’été du CIEPAD (Carrefour d’Echanges et de Pratiques Appliquées au Développement) en 1994.
Trois Ariégeois sont présents, et le SEL de l’Ariège est lancé en octobre de la même année.
Ce SEL prend en charge la traduction et la diffusion de l’Infopack (« SEL mode d’emploi » anglais).
Cet Infopack, l’engouement des médias, et l’enthousiasme des pionniers provoquent un développement rapide.
Le premier SEL moderne de France a été créé en 1994, en Ariège.
Dix ans après, il y a près de 380 SEL dans 96 départements, de tailles plus ou moins modestes (de 2 à quelques centaines de membres) suivant les régions, qui permettent à plus de 20 000 personnes de procéder à des échanges. Aujourd’hui (octobre 2009) il y a environ 400 SEL en France.
L’origine de l’expression SEL, Création du nom :
Les Sel sont des associations locales. L’acronyme « Sel » a été choisi pour son homonymie avec le sel, aliment, monnaie d’échange ancienne, à l’origine du mot « salaire ».
Il existe plus de 1000 Sel en France, généralement classés dans l’économie sociale et solidaire.
Source : wikipédia et Association Sel’Idaire
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